La formation dehors, le pas de côté d’Audrey Auriault dans les formations Animacoop

, par  Michel Briand , popularité : 8%

Après une série d’interviews, récits d’Histoires de coopérations, voici un autre volet sur le thème des « pas de côté ». Dans nos structures nous sommes souvent contraints par une culture héritée du modèle hiérarchique, peu enclin à être en attention, ouvert aux envies de faire, en coopération ouverte. Pourtant nous avons tous des espaces de liberté qui par un pas de côté nous permet d’agir en accord avec nos valeurs de solidarité, de partage, d’attention aux autres. Cette nouvelle série d’interviews illustre la diversité de ces possibles « en lisière » qui ne nécessite bien souvent qu’un consentement sans autorisation à solliciter.

Et pour débuter cette série voici quelques mots d’Audrey Auriault, sur la formation au-dehors ; formatrice à Animacoop, le réseau des formations à la coopération ouverte. Voir aussi son interview dans "histoires de coopérations »

Ndr : Ce thème des pas de côté est aussi proposé pour le prochain Forum des usages coopératifs(juillet 2024) ; merci à toutes celles et ceux qui voudront contribuer à donner à voir ces récits de « pas de côté ».

Bonjour, Audrey est ce que tu pourrais nous présenter un pas de côté que tu as eu l’occasion de faire ?

Je pense à un pas de côté que j’ai réalisé dans le cadre de mon activité professionnelle. Je suis formatrice et facilitatrice de projets coopératifs avec tout un collectif d’une trentaine de personnes qui forment et transmettent autour de ces questions de coopération. On anime notamment une formation Animacoop où on partage en commun des déroulés, des contenus, des facilitations, des activités, avec les stagiaires.

On s’est rendu compte qu’il y avait une dimension qui nous manquait, qui nous manquait presque physiquement, qui était le fait de faire réfléchir les gens dehors, d’emmener les personnes dans la nature pour qu’elles travaillent et qui réfléchissent ensemble dehors. Cela s’est mis en place progressivement et, pour moi, de dire " on se connecte avec notre environnement" est un pas de côté qui est devenu assez central .

C’est assez facile lorsque l’on est en proximité de ma mer avec par exemple des séquences de formation qui se font sur la plage. Mais cela peut aussi se faire sur un bout de forêt.

On a réfléchi à quelles activités étaient les plus propices à faire dehors, dans cette formation qui utilise pas mal les outils numériques aussi. On n’est pas à faire scoutisme sur la plage mais par exemple ce qu’on appelle des accélérateurs de projets ou du codéveloppement. Cela fait appel à l’intelligence collective. Le fait de mettre les gens d’abord en mouvement physique et puis ensuite dans un environnement naturel, est une petite révolution. Au début c’était un peu bizarre pour les stagiaires de se dire ah oui, tiens, on va aller faire une formation sur la plage ensemble, ça fait pas sérieux.. quo
En fait, on a argumenté pédagogiquement pour expliquer pourquoi, au contraire c’est très sérieux et pourquoi ça produit des effets fantastiques sur la qualité de la formation et sur la qualité de la production collective

Est ce que tu pourrais me présenter un peu justement ce que ça apporte ?

Cela apporte d’abord une qualité de concentration par le fait d’être dans un environnement qui en général est assez beau, on voit la mer, on est en contact avec les arbres. Du moins c’est mon interprétation mais je ne suis pas neuroscientifique et je ne sais pas ce que ça produit physiologiquement, mais en tout cas, ce que je remarque et ce que je constate, que la qualité de la concentration est très différente. Les personnes sont beaucoup plus attentives les unes aux autres.

Ensuite, cela produit une espèce de sérénité, de tranquillité et je l’associe plutôt à la question du mouvement. Je pense que cela rend aussi plus créatif. Être en mouvement avec par exemple de discussion en marchant, amène à poser des questions aux personnes à côté. On les invite à réfléchir en marchant par groupes pas trop nombreux de deux ou trois, pour qu’ils soient en capacité de s’entendre facilement.

En fait, le mouvement corporel vient accompagner le mouvement intellectuel, voire cérébral. On a l’habitude de le faire seul et c’est un art d’aller réfléchir. Souvent on nous dit "moi j’ai besoin de marcher pour réfléchir, donc je me lève, je vais marcher"O. n a moins l’habitude de le faire en collectif. Et effectivement, cela produit une créativité, une capacité de réflexion un peu différente.

Après l’avoir expérimenté est ce que cette idée a été a été reprise par d’autres formations, sur d’autres territoires ?

Je sais que ça a été repris à Paris, notamment autour de deux formations urbaines. On va faire le point en janvier lors du prochain regroupement des formateurs animacoop et échanger sur ce que la nature de l’environnement change. Moi, je l’ai fait dans des environnements naturels, plutôt la plage, dans une forêt, etc. Qu’est ce que ça donne quand c’est quelque chose de urbain ?

NdR : Et proposition : peut-être l’occasion d’une contribution aux rencontres de la Classe dehors à Poitiers en juin prochain ?