Wiki-brest et pratiques collaboratives Interview autour de wiki-brest sur Manche numérique

, par  Michel Briand , popularité : 17%

Manche Numérique a entrepris de présenter une série d’interviews d’acteurs de la société de l’information dans la Manche et en France.

Voici le texte mis en ligne à propos de wiki-brest

L’interview sur le site de Manche Numérique

Michel Briand, co-fondateur de l’association CRéATIF, adjoint au Maire de Brest

Co-fondateur de l’association CRéATIF dont l’objet est de favoriser l’appropriation sociale et citoyenne des nouvelles technologies de l’information en France dans les lieux d’accès publics, Michel Briand est l’adjoint au Maire de Brest en charge de la démocratie locale, de la citoyenneté et des nouvelles technologies et directeur adjoint de la formation et délégué aux nouvelles technologies à l’École nationale supérieure des télécommunications de Bretagne. Fortement impliqué dans la promotion des technologies de l’information et de la communication (TIC), Michel Briand expose son point de vue sur les wikis et les pratiques collaboratives.

Manche Numérique : À propos du phénomène web 2.0, quels enjeux et quelle place pour une intervention publique ?

Si par web 2.0 on entend les outils de communication qui permettent des échanges de tous vers tous, l’enjeu est énorme si nous ne voulons pas laisser se creuser les fractures entre ceux qui savent utiliser ces outils et l’autre moitié de la population restée à l’écart de l’internet et des objets numériques.

Accompagner les usages par l’accès public de proximité, la médiation dans les lieux publics existants est aujourd’hui encore plus important que lors des 10 premières années de diffusion de l’internet ancien : l’internet devient en effet omni présent.

Certaines collectivités locales participent à cette médiation mais à une échelle insuffisante. L’expérience de Brest où nous avons aujourd’hui un réseau de 100 Papis (points d’accès public à internet) nous montre qu’il faut au minimum une personne en médiation pour 2 à 3 000 habitants dans les habitats sociaux éloignés de l’internet et nous n’y sommes pas encore arrivés !

Et si l’on regarde du côté des collectivités locales, l’émergence de ce web plus participatif pose question à un fonctionnement hiérarchique où l’information est encore le plus souvent enfermée à clé : combien de sites web de collectivités ont un fil RSS ? Combien permettent que le contenu soit réutilisable par une licence Creative Commons ou autre ? Combien sont ouverts à l’écriture des acteurs de la collectivité aux remarques des habitants ?

Le mél et la consultation du web se sont répandus dans la collectivité. Aujourd’hui l’appropriation des outils du web 2.0 n’est pas une question d’outil mais d’évolution des pratiques de circulation et de production de l’information qui passe par la lente diffusion de pratiques collaboratives encore trop rares en France.

Vous avez lancé Wiki-Brest il y a plus d’un an. Quels objectifs vous vous étiez fixés ? Quel bilan vous dressez aujourd’hui ?

Wiki-brest était au départ une envie d’écriture sur le patrimoine culturel et le vivre ensemble qui contribue à donner du sens à un territoire : le pays de Brest, à la pointe de Bretagne, est composé de 89 communes où vivent et habitent 360 000 personnes. C’était le pari de reproduire sur un petit territoire l’utopie d’une écriture collaborative inspirée par Wikipédia.

Après une année 2006-2007 d’expérimentation, le projet est entré dans une phase de diffusion où nous allons solliciter les personnes, les associations, les services publics au fil des évènements quotidiens : exposition dans une mairie de quartier, fête de la soupe, fête du livre, anniversaire d’un équipement…

Et petit à petit le projet avance : avec un millier d’articles, 600 contributeurs, un million de pages visitées, Wiki-brest commence à faire partie du paysage du pays de Brest.

Comment est organisé ce projet ? Qui en sont les porteurs, les acteurs, les partenaires ?

Il faut bien savoir que nous sommes partis d’une page vide. C’est au fur et à mesure des écrits apportés, des collectes organisées que le contenu s’organise suivant une "démarche où nous apprenons en marchant". Depuis septembre, avec l’apport de Jean-François Gaffard impliqué dans la création de Wikipédia en France et l’arrivée d’une animatrice du projet à temps plein, Gaëlle Fily, le projet s’est structuré en reprenant les outils de Wikipédia :

  • les portails permettent des espaces dédiés pour les journaux de quartier, les jardins mutualisés, l’album des points d’accès publics à internet…
  • les collectes thématiques focalisent l’attention sur les recettes de cuisine, la parole et la place des femmes et pour Brest 2008 les 7 marines
  • le bistrot et l’accueil des contributeurs facilitent les premiers pas des rédacteurs
  • les wiki-apéros inaugurés en février permettent aux personnes de se rencontrer
  • une quinzaine d’ateliers par mois ouvre de nouveaux projets d’écriture...

L’écriture devient diverse à l’image de la population du pays de Brest. La Ville restant le pivot qui anime le projet et l’adapte au fur et à mesure de son développement. Des partenariats se nouent avec des cybercommunes, des conseils de quartiers, les bibliothèques municipales, les mairies de quartier, des individus impliqués autour des collectes de mémoire…

Quelles sont les perspectives de développement et de valorisation de ces projets collectifs ?

L’année 2008 est celle de la diffusion. Wiki-brest peut maintenant être proposé à toutes celles et tous ceux qui sont concernés par une mise en valeur et en biens communs du patrimoine et du vivre ensemble. Le projet passe doucement de l’enfance à une adolescence qui lui permettra, nous l’espérons, d’acquérir une autonomie et de grandir.

Le projet est l’occasion de poser les questions de l’évolution des biens publics vers les biens communs dans une société où trop de productions publiques restent enfermées sous clé ; chaque écriture est l’occasion d’aborder cette question des droits d’auteurs fermés ou élargis.

A travers l’écriture dans Wiki-brest des centaines de personnes s’initient aux wikis : Wiki-brest est un levier pour découvrir l’écriture collaborative. La vingtaine de wikis aujourd’hui mis en œuvre témoigne d’un début de diffusion d’une culture collaborative où nous apprenons à coopérer entre acteurs des services publics et acteurs associatifs ou individuels.

La diffusion de Wiki-brest c’est aussi le pari d’une écriture qui prenne en compte les personnes éloignées du web et de l’écrit dans une démarche de reconquête de l’estime de soi et de mise en valeur des personnes. Là aussi nous espérons que les pages des jardins mutualisés ou des journaux, les tranches de vie, les implications d’associations autour de l’insertion nous permettront de faire vivre une écriture aussi diverse que peut l’être la vie d’un territoire.

Par des projets cousins comme territoires sonores, nous expérimentons les balades sonores qui donnent à entendre cette fois un aperçu sonore des territoires habités.

Et nous avons aussi à apprendre d’autres projets tels Wiki-Manche qui s’engagent dans cette démarche d’écriture collaborative et espérons les retrouver cet été au troisième forum des usages coopératifs.

Février 2008

- Les interviews précédentes :

  • Christophe Valdeyron, directeur général délégué de Manche Télécom
  • Docteur Jean-Yves Bureau, président du Conseil de l’Ordre des médecins de la Manche
  • Serge Bergamelli, directeur du département « Développement numérique des territoires » de la Caisse des dépôts et consignations (CDC)
  • Isabelle Simon, directrice des relations régionales Ouest au sein de SFR, nous éclaire au sujet de la téléphonie mobile.
  • Gabrielle Gauthey, membre du collège de l’Autorité de régulation des communications électroniques et postales nous présente ses missions et analyse le paysage haut débit en France.
  • Didier Rembert, directeur de MédiaManche, société opérant sur le réseau WiFi manchois, nous expose les raisons de son implantation dans notre département.
  • Nathalie Tapin, webmestre du site internet de la Ville de Gavray
  • Nicolas Le Bellier, animateur du Centre multimédia des Pieux
  • Frédérik Lequilbec, représentant départemental de l’APF
  • Joël de Rosnay, futurologue et spécialiste des nouvelles technologies
  • Thierry Gellé, vice-président de la Communauté urbaine de Bordeaux
  • André Perramant, président de Wikimanche
  • Jean-Marc Dubreuil, président d’Intel France
  • Jean-Michel Ombrouck, directeur régional de France Télécom pour la Basse-Normandie
  • Bruno Weinreich, président de NomoTech

Dès 1995, le Conseil général de la Manche s’est engagé dans une politique ambitieuse en matière de technologies de l’information et de la communication, TIC. Conscient des enjeux que représente le haut débit, le Département a décidé, en 2000, de créer son propre réseau de communications électroniques, le Backbone Universel de Services (le BUS).

Par souci de cohérence départementale, le Conseil général a souhaité impliquer chaque communauté de communes dans un projet global d’aménagement numérique du territoire.

Avec la création du syndicat mixte Manche Numérique, en 2004, les communes, les communautés de communes et le Conseil général disposent désormais d’un outil mutualisé en matière d’infrastructures de télécommunications, d’usages et d’assistance informatique à ses membres.

Manche Numérique exerce deux compétences :

  • l’aménagement numérique du territoire : déploiement des infrastructures de télécommunications et promotion des usages en matière de technologies de l’information et de la communication, TIC (volet 1),