Cartes ouvertes données publiques, contenus réutilisables un tournant possible en 2011 : juste faisons le …

, par  Michel Briand , popularité : 14%

L’année 2010 a vu l’émergence d’initiatives de collectivités "libérant" leurs données, telles la délibération de Brest métropole océane permettant la libre réutilisation des données géographiques ou la réutilisation des données de transport et la plate forme d’entrepôt de données "OPEN DATA" initiée par Rennes Métropole. Alors que les initiatives en Angleterre, en Australie et dans différents pays se développent portées par les gouvernements, il a fallu attendre 2010 pour qu’apparaisse en France une libération des données publiques.

Après des années de services public sous clé d’accès, interdits de réutilisation, la généralisation du numérique, la diffusion de l’internet mobile et l’interpellation d’initiatives citoyennes (Openstreetmap, veille de la FING, associations comme Libertic, Regards citoyens, Cartes ouvertes), posent question aux politiques publiques.

Doit on

  • dans la lignée d’Hadopi enfermer, mettre des verrous, contrôler, sanctionner en espérant vendre des contenus duplicable sans coût ?
  • ou libérer les initiatives, élargir les biens communs faciliter les usages innovants et inventer de nouveaux modèles économiques basés sur les services et non les royalties ?

Ce débat concerne chacun-e d’entre nous : mettre ses contenus dans une licence qui élargit les droits de réutilisation du lecteur est une question posée à chaque élu dans sa délégation, chaque rédacteur d’article sur un blog , chaque enseignant pour les contenus pédagogiques qu’il produit , chaque acteur du service public pour les contenus qu’il met en ligne.

... Juste faisons le chacun-e à notre niveau !

Petite contribution pour une année 2011 des contenus ouverts réutilisable..

L’année 2010 est celle d’une émergence de la question des données publiques en France.

Alors que les initiatives en Angleterre, [1] en Australie et dans différents pays se développent portées par les gouvernements il a fallu attendre cette année pour qu’apparaisse un mouvement de libération des données publiques en France.

Les cartes ouvertes

C’est dans le domaine des cartes que le mouvement est le plus visible porté par les cartes libres d’Openstreetmap qui nous rappele ici l’utopie de l’encyclopédie collaborative wikipedia.

Openstreetmap est un projet destiné à réaliser une carte du monde, sous licence dite “libre”. Cela signifie, dans notre cas, que tout le monde est libre d’utiliser, d’améliorer, de distribuer ou d’effectuer des travaux dérivés à partir de nos cartes, donnant ainsi une liberté bien plus grande que les solutions déjà existantes, telles google maps.

(extrait de la présentation par OSM)

En quelques année, par l’implication de milliers de personnes une base cartographique mondiale s’est bâtie avec Openstrretmap au point qu’en Bretagne le portail géographique Géobretagne peut aujourd’hui afficher par défaut la carte d’openstreet map avant celle d’IGN !

La nouveauté 2010 c’est l’apport des collectivités qui versent dans Openstreetmap leur données géographiques : rues, cadastre, limites communales ..

A Brest, Rennes, à la région Bretagne, à Paris.. des délibérations actent le fait que les données géographiques sont librement réutilisables.

Le statut des données est en débat : OSM utilise la licence Creative commons by sa mais s’interroge sur un passage à la licence Open Database License (ODbL), licence retenue après débat par la ville de Paris.

Ce mouvement concerne aussi des petites communes rurales comme Plouarzel en pointe du finistère qui a réalisé des carto-parties avec les habitants et distribue, pour cette fin d’année2010, une carte librement réutilisable à chaque habitant.

Une dizaine d’initiatives ont vu le jour ces derniers mois dans un mouvement qui semble s’accélérer (voir par exemple le bulletin de veille de Libertic et la soixantaine d’articles de la rubrique "données ouvertes" d’a-brest).

Ce mouvement bénéficie d’une double dynamique

  • d’un côté c’est le pari d’un développement de nouveaux services rendus possible par la réutilisation des données publiques avec une application particulière à l’internet en mobilité en plein essor. C’est le parti pris d’agglomérations comme Rennes qui l’organise avec un concours d’application et l’ouverture de leur plate forme d’entrepôt de données.
  • et c’est l’implication d’acteurs associatifs dans une appropriation de ces données rendues publiques. A Rennes, toujours c’est le projet "Cartes ouvertes" des initiatives permettant de réduire notre empreinte écologique porté par la Maison de la consommation et de l’environnement et inscrit dans le projet "greenmap". A Paris et Nantes ce sont les chasses aux trésor de l’Opendata initiées par Regards citoyens et Libertic

C’est aussi une articulation qui crée du lien sur un territoire rapprochant "mappeurs" d’openstreetmap, élus communaux, techniciens des systèmes d’information géographiques et acteurs du multimédia tel la demi douzaine d’initiatives de "Cartes ouvertes au pays de Brest" articulée au projet wiki-brest.

Mais il y a encore en France assez peu d’initiatives d’usages citoyens de ces cartes libres. On ne trouve pas encore par exemple de collectivités locales qui permettent d’indiquer à la vue de tous les incidents sur la voie publique à la mode de ce qu’a pu réaliser Yverdon en Suisse ou de ce que propose le site britannique "Fix my street". [2]

Des données publiques réutilisables

Dans la perspective de développement de services locaux le mouvement des cartes libres s’est élargi aux données ouvertes avec la création de plates-formes libres d’entrepôts de données tel Opendata développé pour Rennes par In Cité solution.

Les données de transport mis à disposition par Keolis et Rennes métropole en début d’année ont été élargies par une large gamme d’informations et font l’objet d’un concours de développement d’application sur les usages

L’agence du patrimoine immatériel de l’état (APIE) propose des pictogrammes pour identifier les données réutilisables mais les données de l’IGN, de l’INSEE ne sont toujours pas librement réutilisables. Une ouverture toutefois en 2010 l’IGN a permis aux collectivités de réutiliser ses données géographiques.

Du côté des associations Regards citoyens développe plusieurs initiatives tel NosDéputés.fr, Observatoire de l’activité des députés à l’Assemblée Nationale, ou Géolocalisons les bureaux de vote pour que les données électorales soient librement accessibles et cartographiables ou des chasses aux trésors de l’"open data".

Les données ouvertes s’inscrivent bien dans une logique des biens communs numériques élargis :

  • de nombreux magazines qui en rendent compte comme internet actu, Regards citoyens, Libertic, a-brest,, Artesi font le choix de licences creative commons qui élargit les libertés du lecteur, permet une republication des contenus, facilite la diffusion des initiatives et la veille mutualisée.
  • les plates-formes de traitement des données géographiques comme géoorchestra sont développés en GPL en associant la communauté openstreetmap pour en faciliter la réutilisation des modules tout comme comme la plateforme "Opendata" d’entrepôt de données développée à Rennes ou l’initiative "nos données.fr".

Avec les initiatives de Rennes, Brest, Paris, Montpellier, Toulon, de la Bretagne , l’Aquitaine, le mouvement devient visible et interpelle les autres collectivités. En cette fin d’année 2010 nous sommes passés des initiatives pionnières à une logique de diffusion à laquelle contribue les rencontres de Rennes et de Bordeaux et le réseau d’acteurs mis en place par la FING. [3]

Aux contenus ouverts

Ce mouvement des données ouvertes pose la question des contenus produits par la collectivité : sont-ils aussi des contenus réutilisables ?

En regardant les mentions légales associées aux sites des collectivités locales on mesure encore le chemin à parcourir . Dans la plupart des villes citées précédemment, la mention précise que toute réutilisation est interdite sauf accord explicite. [4]

Et dans la liste de références de sites sous Creative commons je n’avais référencé l’an passé que deux petites dizaines de sites de collectivité sur les milliers existants !

Et bien que la loi permette que les citoyens puissent demander une version numérique des documents et études produits et que la collectivité doit en définir les conditions de réutilisation, il y a ma connaissance très peu de répertoire de ces dossiers et études pourtant produites par les agences d’urbanismes et les services des collectivités.

Faire en sorte que les contenus soient accessibles et réutilisables est un changement de mentalité qui demande du temps. Aujourd’hui l’élu ou le technicien qui commande une étude s’en sent bien souvent propriétaire même si elle est financée par l’argent public.

Combien de schéma d’aménagement numérique par exemple ont été commandés par les agglomérations, les départements et les régions sans être mutualisés payant plusieurs fois la même présentation générale adaptée au contexte local ?

Ici et là ce sont des initiatives locales qui font que les archives les photographies des œuvres d’un musée dans le domaine public sont mis en ligne et réutilisables.

C’est en popularisant les mises en bien communs tel ce partenariat entre wikimedia France et le musée de Toulouse que cette question qui parait bien simple des biens numériques mis en commun se diffusera parmi les acteurs des services publics.

Juste faisons le !!!

Faire connaitre les initiatives, interroger les administrateurs du site de votre collectivité, s’informer sur les questions des licences, beaucoup de pistes de travail pour qu’au delà des données ouvertes nous avancions sur le chemin d’une collaboration ouverte et de contenus largement accessibles.

Restera le chantier immense des contenus pédagogiques. Alors qu’en Espagne 33 universités participent à l’Open Course Ware consortium de mutualisation des contenus pédagogiques initié par le MIT seule une université y est inscrite en France. Et lorsque l’on consulte les mentions du site ouvert par l’éducation nationale on y trouve que les contenus ne peuvent pas être réutilisés sans autorisation par un professeur en classe, seul l’usage par une personne privée est possible !

Pourtant lorsqu’à Telecom Bretagne une licence Creative commons a été proposée pour les cours mis sur le web aucun refus d’enseignant, et une trentaine de cours sont en ligne et réutilisables.

C’est le paradoxe du service public en France où ce sont les initiatives associatives tel ce travail exemplaire du réseau sesamath qui font avancer les choses sans aucun soutien ou financement de l’état !

A la différence des logiciels libres [5] où nous sommes nombreux à être simple utilisateur et pas développeur, les contenus ouverts nous concernent tous.

Editeur d’un blog, rédacteur d’un article, contributeur d’un wiki chacun-e de nous a le choix d’indiquer qu’il souhaite que son contenu soit réutilisable [6] ; (voir l’article d’April"Libérez vos oeuvres : appel à publier sous licence libre).

C’est particulièrement vrai pour tous les acteurs de la vie publique élu-e ou technicien-ne du service public, les contenus produits doivent-ils être interdits de réutilisation par défaut ?

Et si nous voulons une société ouverte agissons localement en ouvrant la possibilité d’une réutilisation de nos contenus !

alors juste faisons le !!!

pour que 2011 soit une année où s’élargisse ce mouvement les biens numériques mis en communs

Michel Briand

vice président de Brest métropole océane en charge de

l’aménagement numérique du territoire

et de l’économie sociale et solidaire.

Et n’hésitez pas pas à signaler des initiatives

 a-brest est ouvert à votre écriture

tout comme les portails

 sur les sites sous creative commons

 ou les références d’initiatives sur les données ouvertes du pays de Brest

merci d’avance