Adaptation des politiques d’incitation à l’usage d’internet dans les quartiers à Brest Contribution de la ville de Brest au projet "Psaume" du laboratoire des usages Marsouin
L’approche menée par la ville de Brest depuis 1997 privilégie l’accompagnement des usages à la mise en place d’infrastructures ou de services de types télé-procédures. Dans cette dynamique, l’observation des usages, l’évaluation des dispositifs d’accompagnement sont un élément important pour guider l’évolution de la politique de la collectivité locale.
La participation au projet Psaume s’inscrit dans cette logique illustrée notamment par deux bilans des points d’accès publics (les papis) et par la participation active à la collection des guides de l’observatoire des télécommunications dans la ville de 1997 à 2002.
Synthèse du travail d’étude ménée par le laboratoire Mrasouin dans le cadre du projet de recherche "Psaume" et publiée sur le site du projet de recherche Psaume
P-S-A-U-M-E
Populations Socialement défavorisées : Analyse des Usages et des Moyens de les Étendre
– Adaptation des politiques d’incitation à l’usage des TIC. Contribution de la ville de Brest
publié le vendredi 27 janvier 2006
Elisabeth Le Faucheur Joncour
les autres articles de l’étude
– Les modalités d’usage des technologies numériques dans le cadre du quartier de Kérourien (Brest).
http://marsouin.infini.fr/psaume/article.php3?id_article=17]
publié le vendredi 27 janvier 2006
par Annabelle Boutet , Hélène Trellu
– Enquête qualitative sur les usages d’Internet par des populations dites "socialement défavorisées"
publié le lundi 6 février 2006
par Smaïl Hadj Ali
– Utilisateurs et non-utilisateurs des TIC
, une enquête en Bretagne
publié le lundi 24 octobre 2005 , par Nicolas Jullien
– Bilan de la première année du projet Psaume
publié le samedi 18 juin 2005
par Nicolas Jullien
– Étude de la place d’un espace public multimédia dans un quartier de Brest : Kérourien
publié le vendredi 3 juin
par Annabelle Boutet , Hélène Trellu
– Evaluation du dispositif d’accès public à Brest : Analyse et propositions
publié le lundi 18 avril 2005
par Elisabeth Le Faucheur Joncour
– Présentation du projet soutenu par le MRNT.
publié le mercredi 2 février 2005
par Nicolas Jullien
Il y avait deux parties dans le sous-projet 3 : « adaptation des politiques d’incitation à l’usages des TIC »
– « un état des lieux des usages et des actions menées dans les points d’accès publics de la ville et du pays de Brest
– ensuite, fort de cet état des lieux, connaissant les résultats des enquêtes scientifiques menées dans les deux premiers sous-projets, la Ville de Brest, aidée des chercheurs de M@rsouin a réfléchi sur l’évolution des supports de formation et les pratiques d’accueil des populations concernées. »
C’est le résultat de ces travaux et de ces réflexions qui est présenté ici.
État des lieux des usages et actions menées dans les points
d’accès public à Internet et au Multimédia sur Brest : le diagnostic
et son impact sur la décision et l’action.
Cette étude 2004-2005 est complémentaire de celle menée les années précédentes par le laboratoire
M@rsouin sur le dispositif cybercommune de la région Bretagne (Cf. synthèse en annexe).
– Le diagnostic présente à la fois l’offre d’accès public à Internet ainsi que les usagers, leurs pratiques
et leurs demandes. Il met en évidence les forces et faiblesses du dispositif par rapport aux
publics, aux activités et usages. En partant du contexte général de l’accès public en France et
d’une analyse des enjeux pour les prochaines années, ces éléments ont contribué à élaborer des
propositions d’action, pour l’évolution de l’accompagnement des populations dans l’appropriation
sociale des technologies de l’information.
La ville a ainsi retenu 3 grandes orientations qui répondent
aux enjeux identifiés :
- la prise en compte des publics éloignés (par publics éloignés, il faut entendre éloignement
social, culturel, handicap, isolement, difficulté d’adaptation des personnes âgées),
- l’équité d’accès au service public, lorsque le nombre de services impliquant des téléprocédures,
de la navigation sur le net s’accroît considérablement laissant de côté les personnes
n’ayant pas d’accès au travail ou au domicile et les personnes peu habiles avec
ces outils,
- la diffusion des nouvelles cultures numériques : blogs, wikis, photo numériques, web
radios, vidéos, jeux, arts numériques.
UNE POLITIQUE ET DES ACTIONS CONFORTÉES
DÉCLINÉES EN 3 AXES :
A) La diffusion des nouvelles cultures numériques
L’arrivée d’Internet fluide puis du haut débit (2Mb et plus), les progrès des technologies et la
démocratisation des appareils audio-vidéo numériques ouvrent de nouveaux champs d’expression,
de communication. Il appartient à la collectivité comme elle le fait dans des champs plus
classiques : musique, journaux de quartiers, clubs photos, clubs informatiques des centres sociaux,
maisons pour tous et patronages laïques, d’accompagner l’appropriation de ces usages.
Pour favoriser cet accompagnement des ateliers, outils et services ont été conçus et mise en
oeuvre au profit des animateurs de lieux d’accès publics, relais dans cette appropriation. Le cadre
du centre de ressources pour l’accès public à Internet en pays de Brest a facilité cette mise en
place avec un groupe de travail, constitué d’animateurs, qui définit chaque semestre le programme
des ateliers/formations. La plupart des formations sont réalisées par des animateurs qui
ont acquis les compétences recherchées par d’autres ce qui permet de renforcer le travail en réseau
au delà de l’action de formation et contribue à l’objectif recherché d’un diffusion de nouvelles
compétences en matière de cultures numériques.
Ateliers « Vidéo », « retouches photos », « Webreportage » réalisés à destination des animateurs
et médiateurs multimédia totalisent près de 200 heures d’ateliers sur 12 sessions avec une
participation de 74 personnes aujourd’hui en position de former leurs usagers et de développer les
usages multimédia. (cf. Liste des ateliers en annexe).
L’appel à Projet annuel organisé par la ville de Brest contribue aussi à l’émergence et la diffusion
de ces nouvelles pratiques culturelles par un soutien à une trentaine d’initiatives. En 2005
l’accent mis sur la co-production de contenus se traduit par le soutien à 5 projets autour de la mémoire
collective.
L’ensemble de ces actions contribue à une dynamique et un développement des initiatives aujourd’hui
en pleine croissance : une dizaine d’équipes de web reporters des quartiers, 200 jeunes
des lycées à la cité scolaire de Kérichen ... Un réseau se structure qui donne à son tour naissance
à une plate forme de publication. Ce projet soutenu aujourd’hui par la région associe une entreprise
locale dans le développement d’un logiciel libre réutilisable qui sera présenté à l’occasion du
forum des usages coopératifs de juillet 2006.
B Équité d’accès au service public :
Alors que se développent les services publics en ligne tant au niveau national que local, se
posent la question d’une part, de l’accès à ces services par les personnes et familles ne disposant
pas d’outils ou de connexion Internet, et de l’ accompagnement de toutes les personnes peu familières
de ces outils du Web.
Ces services concernent de nombreux domaines du quotidien : Emploi, avec les sites de l’ANPE,
de l’Assedic, famille avec la CAF, Déclaration de revenus... À noter pour ce dernier, que les demandes
d’accompagnement auprès des lieux d’accès publics ont été nombreuses y compris de la
part de personnes équipées et connectées.
Ces nouveaux services renforcent l’écart que certains appellent « fracture numérique » (« digital
divide ») mais qui est avant tout un prolongement des inégalités sociales et constitue un enjeu de
cohésion sociale.
Il apparaît alors essentiel pour la ville de Brest et le Centre de Ressources Coopératif pour l’Accès
Public à Internet du Pays de Brest1 de pouvoir engager des actions de sensibilisation, d’information,
d’accompagnement à l’usage des services en ligne
Rendre accessible l’information numérique passe par une médiation humaine.
C’est le rôle que jouent nombre d’animateurs au contact des publics.
Mais cette interpellation est bien plus large, elle concerne l’ensemble des acteurs du service public
local qui ont à prendre en compte cette demande sociale. Les animateurs des lieux d’accès publics
peuvent jouer un rôle de sensibilisation, d’accompagnement pour faciliter cette évolution des
métiers.
C’est dans cette logique qu’une rencontre a été organisée, le 27 juin 2005, à l’échelle d’un
quartier présentant le portail services-publics.fr. Ce type d’action
est souvent le point de départ d’idées, et de projets partenariaux. C’est le cas sur ce quartier, où
des acteurs de l’insertion prévoient avec l’espace multimédia d’accompagner des personnes en
rupture avec l’emploi pour les informer et les former sur les démarches en ligne, l’animatrice exerçant
un rôle de médiation entre l’usager et le service en ligne.
C) Publics éloignés.
Le diagnostic a montré tout l’intérêt du réseau des PAPI brestois pour permettre l’accès d’une
majorité d’usagers mais également l’absence de certains publics parmi les usagers des espaces :
personnes socialement éloignées, personnes en situation de handicap.
Accessibilité des nouvelles technologies par les publics handicapés
Un groupe de travail a été constitué visant à mettre en réseau les associations spécialisées, les
animateurs de lieux d’accès publics à Internet, les services et institutions (la ville et ses services,
le CDDP, le conseil général).
Des formations, informations pédagogiques et techniques (quels outils pour quel type de handicap
?) ont été réalisées. Cette première initiative a été suivie d’une visite d’une salle multimédia
dédiée aux personnes handicapées par le groupe.
La mise en réseau des acteurs a été le point de départ d’une dynamique autour de nouveaux
projets : installation d’une synthèse vocale sur Landerneau, création d’une association « défivisu.
com » visant à former les déficients visuels à la synthèse vocale pour leur permettre de communiquer
en toute autonomie via Internet. De son coté, la ville a étendu son réseau d’accès public
(PAPI) au sein d’associations spécialisées dans l’accueil des publics handicapées (Ex. URAPEDA,
Papi équipé de Webcam pour les publics sourds et malentendants)
Actions à destinations des publics socialement éloignées
Cf. II. Impact de l’étude sociologique...
Très complémentaire au diagnostic sur les PAPI brestois, l’étude sociologique réalisée sur un
quartier en zone sensible de Brest au sein d’un espace multimédia permet de mieux identifier les
leviers de l’appropriation des nouvelles technologies par des publics qui en sont éloignés. La partie
qui suit présente l’impact de l’étude sociologique sur les actions mises en oeuvre.
II. Impact de l’étude sociologique réalisée sur le quartier de Kérourien
sur les projets de la ville
1.Une étude complémentaire sur le quartier du Valy Hir
En complément de l’étude sociologique conduite sur le quartier de Kérourien, la ville de Brest a
souhaité disposer d’une étude du même type dans un autre quartier populaire, le Valy Hir. L’intérêt
de cette seconde étude, est de disposer d’une analyse complémentaire sur l’animation, les usagers,
les apprentissages dans un quartier également situé en zone sensible. L’approche n’est pas
comparative mais relève d’avantage d’un recueil et d’une analyse de pratiques différenciées.
2.Le projet Internet de Quartier de Kérourien
(Frédéric Bergot, référent Ville sur ce projet)
Avec le réseau d’animation scolaire sur Internet au collège de Kéranroux puis l’ouverture de
l’espace public multimédia à Kerourien et le travail d’animation réalisé, les acteur-ice-s du quartier
ont commencé à découvrir l’intérêt des outils de l’Internet et du Multimédia.
L’espace public multimédia est ouvert depuis 2003.
L’ouverture de l’espace public multimédia de Kérourien s’est inscrit dans la politique municipale
de développement de l’accès au multimédia pour tous dans un souci d’équité d’accès, au service
d’une plus grande citoyenneté, de création ou de renforcement du lien social entre les habitants et
d’une meilleure formation de chacun.
Avec l’ouverture de cet espace, les populations les plus démunies sont particulièrement visées
de manière à ce qu’elles puissent bénéficier des outils nouveaux de communication et d’accès à l’information.
Le point public multimédia de Kérourien constitue un outil au service de la population enfants,
jeunes et adultes, hommes et femmes dans des cadres et perspectives divers :
- démocratiser l’accès au multimédia dans un quartier dit sensible : découverte de l’outil
- fédérer autour du multimédia des projets et des partenaires de quartier, lieu d’expression des
habitants pour les projets autour du vivre ensemble ( site couleur quartier...), pôle ressource
des journaux de quartier
- permettre aux habitants d’accéder à la formation et à la recherche d’information
- accompagnement scolaire et aide aux apprentissages
- lieu de développement des projets lecture-écriture sur le quartier
L’étude menée dans le cadre du projet PSAUME sur le quartier de Kérourien a révélé qu’au
delà des perspectives citées ci dessus, l’espace public multimédia est aussi un lieu de proximité
familier, un lieu créateur de lien social.
L’étude a montré également une évolution dans les usages où les utilisateurs passent petit à
petit de la consommation à la production multimédia.
La place de l’animateur et la façon d’animer l’espace se révèlent déterminantes.
Les résultats de l’étude sur le quartier dans le cadre de PSAUME, et les divers succès rencontrés
en développant des partenariats sur le quartier pour développer des usages dans ou en dehors
de l’espace nous a donné l’envie d’aller encore plus loin.
Et c’est bien pour élargir cet accompagnement sur le quartier que nous réfléchissons ensemble
(professionnels du quartier, associations, institutions) à un projet de quartier autour des usages de
l’Internet et du multimédia en reprenant les perspectives décrites ci-dessus.
Le groupe de travail qui s’est réuni à plusieurs reprises a engagé ou souhaite engager un certain
nombre d’actions.
Pour travailler de manière collaborative, un wiki a été ouvert qui décrit ces actions :
http://www.projet-multimedia-kerour...
15 initiatives ont été mises en avant sur lesquelles les acteurs souhaitent travailler.
- 1. Accompagnement scolaire
- 2. Services Publics en ligne
- 3. Faciliter l’accès Internet dans l’habitat social
- 4. Favoriser l’expression des adolescents via les outils du multimédia
- 5. Accompagnement pour la diffusion des logiciels libres
- 6. Opération Feu Vert
- 7. Le multimédia au service des personnes âgées
- 8. Accompagner l’appropriation sociale des appareils informatiques et numériques dans les familles
- 9. Valoriser les productions multimédia
- 10. Mener des actions de proximité sur le quartier
- 11. Encourager l’utilisation du multimédia par les femmes
- 12. Accès aux droits et à l’emploi
- 13. Réseau d’Aide à la Scolarité par Internet
- 14. Favoriser les e-jumelages
- 15. Coopération des bénévoles pour diffuser l’accès
public à Internet et au multimédia
3.Vers la création d’un réseau d’acteurs sur les publics éloignés
L’étude sociologique conduite sur Kérourien, ainsi que l’édition du guide de Créatif sur l’accueil
des publics éloignés dans les réseaux d’accès public ont montré que :
- les animateurs, les professionnels menant des actions en faveur de publics « en difficulté
» ou éloignés des TIC n’ont pas toujours conscience de leurs compétences par
rapport à ces publics et minimisent souvent l’impact de leur action : « je ne fais rien
d’extraordinaire2 ».
- le manque d’échange avec d’autres professionnels ou bénévoles ne contribue pas à
valoriser leur action et développe un certain isolement de ces acteurs, dont les pratiques
montrent des savoir-faire pédagogiques réels.
– Rencontre entre les projets
Psaume (volet 2) et le projet Internet de rue (Atd Quart Monde)
16, 17 juin 2005 à Méry sur Ois
C’est à partir de ces constats q’un premier rapprochement s’est opéré entre le projet « Internet
de rue »3 conduit par l’équipe d’ATD Quart monde et les partenaires du volet 2 de Psaume (animateur
multimédia de Kérourien, sociologues de M@rsouin, Ville de Brest).
Une première rencontre
s’est tenue à Méry sur Oise les 16 et 17 juin avec pour objectifs :
- Une présentation par les acteurs de terrain de leurs pratiques auprès des publics en
difficultés,
- Un bilan des rencontres permettant d’envisager la suite de ces premiers échanges de
pratiques ainsi que des perspectives de recherche.
– Journées d’étude autour de l’appropriation sociale des TIC
par des publics dits éloignés ou en très grande précarité
Brest, les 25 et 26 octobre 2005
À partir de ce premier séminaire de travail, 2 journées d’étude autour de l’appropriation sociale
des TIC par des publics dits éloignés ou en très grande précarité se sont déroulées à Brest les 25
et 26 octobre à Brest, rencontre pilotée par le département Lussi de l’Enst Bretagne et le Centre
de Ressources Coopératif pour l’Accès Public à Internet du Pays de Brest.
Cette rencontre était
élargie :
- Aux acteurs brestois menant des initiatives spécifiques en faveur de différents publics
(personnes âgées, adultes, jeunes) et dans différents champs (actions intergénérationnelles,
insertion professionnelle, sociale...)
- À des expériences menées sur d’autres territoires (Moulin Habitat, centres sociaux
parisiens, Atd Quart Monde...)
Contexte et objectifs de ces rencontres
Au-delà des informations statistiques sur la pénétration de la technologie multimédia dans les
foyers, la connaissance des pratiques et la prise en compte de l’expertise des acteurs de terrain
deviennent des éléments à part entière du travail de recherche, auprès de groupes sociaux ou de
communautés éloignés (ex. SDF, gens du voyage, etc). À ce titre, les chercheurs du département
LUSSI (ENSt-Bretagne, M@rsouin), au cours de leurs travaux et les agents de la mairie de Brest,
dans le cadre de ses actions, ont relevé l’importance que jouaient la prise en compte du facteur
humain, les liens de proximité, la constitution de réseaux et l’intermédiation dans le transfert et le
partage des expériences.
En effet, ce partage d’expériences joue entre les habitants des quartiers, destinataires des actions
publiques, les acteurs de terrain qui aident à la mise en oeuvre des projets, les acteurs de la
politique locale qui adoptent les projets et les chercheurs qui observent ces phénomènes sociaux.
Dans le cadre d’un travail de recherche, mené dans les quartiers de Kérourien et du Valy Hir à
Brest, sur l’appropriation sociale des TIC, la recherche-action et l’observation participante ont été
des révélateurs des pratiques d’acteurs, de leurs réseaux de développement et des modalités de
leur aménagement. Cette démarche a donc constitué une nouvelle configuration d’aménagement
des interactions entre les acteurs.
Parallèlement à des initiatives de recherche du département LUSSI, en vue de mieux comprendre
l’appropriation sociale des TIC par des publics dits éloignés ou en très grande précarité,
l’objectif a été de mettre en place les moyens de fédérer et de mutualiser les connaissances et les
expériences développer par les acteurs de terrain et les chercheurs autour de ces thématiques.
À ce jour, et suite à ces rencontres, voici les perspectives de travail du groupe constitué
avec pour objectifs de :
- Mettre en commun des expériences, des savoirs, des ressources.
- Favoriser les croisements d’action et d’analyse entre acteurs et entre acteurs
et chercheurs.
- Produire des outils plus ou moins formalisés pour l’action et l’usage des TIC
auprès des plus démunis.
Méthode de travail (propositions)
– 1 Création d’un guide lexical.
Les discussions qui ont eu lieu au cours des 2 journées d’octobre ont mis à jours un certain
nombre de mots-clés qui donnaient lieu à discussion et à controverse.
Pour une bonne compréhension mutuelle, il nous semble pertinent de mettre à la discussion les
différents points de vue.
– 2 Collecte des récits d’expérience.
Il est ressorti que la richesse des expériences des uns et des autres était souvent ignorée et
donc difficile à partager.
En même temps, il semble que c’est sur la base de ces expériences que nous devons à la fois
bâtir les coopérations d’actions, de recherches et de recherche-action.
Il s’agirait de demander à chacun d’identifier une ou 2 situations personnelles, idéalement dès
sa phase préliminaire et de tenir une sorte de journal de bord où serait consigner le parcours de la
personne suivie et accompagnée.
Les points sur lesquels il faudrait porter son attention seraient : les dates, la situation personnelle,
le contexte, les personnes impliquées, les modes d’actions et leurs effets, les difficultés rencontrées
et les solutions (envisagées, trouvées).
– 3 Établissement de fiches de méthodes.
Cette phase serait plus tardive et constituerait la synthèse des 2 phases précédentes.
Elle consisterait à extraire des fiches de travail synthétiques, des pointeurs élémentaires.
Le cadre de travail reste à définir.
III Les apports de l’étude du point de vue des acteurs
1. Le point de vue de l’adjoint au Maire de Brest, Michel Briand
« Le travail d’observation participante menée au sein de l’espace public numérique
du quartier de Kerourien nous a permis de percevoir et de prendre
en compte la richesse des implications humaines apportées par un lieu
d’accueil ouvert sur la quartier et du rôle essentiel de l’animation.
Nous ne sommes plus dans un « équipement pour réduire les écarts » mais
dans la palette des usages inventés par un ensemble d’habitants et d’acteurs
du quartier dès lors que l’animatrice avait su développer une attitude
d’attention aux personnes et aux usages potentiels.
C’est ainsi que le projet d’espace public numérique se transforme en projet
internet de quartier tel qu’il a pu être exprimé dans le chapitre précédent.
La compréhension de cette place essentielle de l’attention aux personnes a
été le déclencheur d’un travail en réseau autour de la précarité. Le séminaire
où ATD quart monde nous a reçu en région parisienne et la réunion
retour avec une quinzaine d’ animateurs impliqués dans l’accompagnement
de personnes en grande précarité a fait beaucoup progressé notre compréhension.
Espérons que le travail en réseau qui émerge de ces rencontres pourra recevoir
les soutien qu’il mérite. »
2. Le point de vue de l’animatrice de l’espace multimédia de Kérourien
: Régine Roué
« L’étude menée au sein de l’espace m’a permis de prendre du recul par
rapport à ma pratique. Je ne me rendais pas compte du besoin des usagers
de trouver autre chose que de la formation sur le lieu (...) Le lien social est
la priorité des gens, les temps d’initiation sont un prétexte pour partager,
échanger...
Sur le volet écriture des animations, l’étude m’a confortée dans mes orientations
et m’a amenée à multiplier les actions en ce sens ». Cf. résultat de l’étude
Psaume Volet 2.
Par rapport à l’absence de certains publics, des actions spécifiques ont été
mises en place à destination des femmes qui culpabilisaient de laisser leur
enfant à la garderie pour venir à l’EPM. Aujourd’hui des animations, parentsenfants
facilitent la venue des femmes du quartier. Parmi ces ateliers, l’atelier
cuisine/recettes pour les mamans, et la dernière animation en date est
un atelier « doudou » où les enfants ont pu scanner leurs doudous, leurs mains, écrirent leurs noms dans leur langues respectives.
Pour l’avenir, Régine tire plusieurs enseignements des résultats de l’étude :
- « L’EPM doit continuer à être un lieu convivial, chaleureux, formateur dans
tous les sens du terme. Les temps de consultation libres devront être
distincts de l’espace avec des bornes d’accès situés en dehors de
l’espace. »
- Le lieu d’accès, aujourd’hui situé dans un appartement est neutre et sans
« étiquette ». Pour Régine, cet aspect doit être maintenu alors même que
l’espace doit prochainement déménager et intégrer le centre social du quartier.
3. La coopération acteurs/chercheurs, le point de vue du référent
Ville de Brest, Elisabeth Le Faucheur Joncour
« Coordinatrice du réseau d’accès public à Internet sur le pays de Brest, j’ai
été désignée comme référent sur le projet Psaume au titre de la Ville de
Brest.
Les représentations autour des coopérations entre les acteurs de terrain et
les chercheurs font parfois état de difficultés à communiquer à échanger,
chacun évoluant dans un monde que l’autre considère comme radicalement
différent.
De mon point de vue, cette idée ne s’applique pas au projet Psaume où la
coopération entre chercheurs et acteurs de terrain s’est révélée très positive
et constructive.
Des échanges réguliers, dès le démarrage de Psaume ont permis à chacun
de trouver et conserver sa place tout au long du projet. »
« En terme de résultat, le regard des chercheurs sur des actions de proximité
permet aux acteurs de terrain de bénéficier, dans une logique de distanciation,
d’un autre regard sur un objet donné et donc d’améliorer la connaissance
d’un contexte dont ils ne peuvent appréhender qu’en partie la complexité.
En ce sens, différents enseignements sont à retirer d’une part, sur la méthode
de recueil des données de l’étude et la nécessité d’une observation
adaptée à un public évoluant dans un contexte donné (par exemple le choix
d’une approche anthropologique sur Kérourien).
D’autre part, les résultats, montrent que les motivations des usagers répondent
à une demande de lien social, positionnant les outils et la technique
en second plan.
Les mécanismes de prises de contact avec les nouvelles
technologies relevant également de cette dimension « sociale ».
L’étude confirme également l’importance de l’animation et du rôle de l’animateur
dans les activités à l’heure où l’animation des espaces pose un réel
problème de financement : pas de participation de l’État, une implication
très hétérogène des régions, des budgets limités des collectivités sur cette
question dans une période de transfert de compétences, et de difficultés
budgétaires.
Enfin, si certains pouvaient s’attendre à retirer de cette recherche des solutions
« toutes faites » et transférables par rapport au modes d’appropriation
des nouvelles technologies par les publics éloignés, la diversité des publics
et de leurs parcours, la singularité des lieux et des médiateurs, rend
l’exercice complexe. Il en ressort néanmoins (et c’est déjà un grand pas)
une méthode d’approche de ces publics, un socle de travail à compléter par
des recherches complémentaires et des échanges de pratiques entre acteurs
de terrain.
En terme d’animation de réseaux d’accès public, il s’agit aujourd’hui de
mettre en partage ces informations, et de les prendre en compte dans les
actions de formation à destination des animateurs, les projets à venir sur les
publics éloignés.
Pour conclure, et de façon plus globale, l’implication de la ville de Brest dans cette étude, relève
d’une volonté forte d’évaluation des politiques et des actions conduites en matière d’appropriation
sociale des nouvelles technologies. L’évaluation, l’observation sont des outils aux services
des décideurs et des acteurs locaux pour réajuster, orienter l’action au plus près du contexte local,
et des populations, pour construire le devenir du territoire et de ses habitants.